L'Arbre de Vie figure, comme on le sait, dans l'Ancien Testament. Il se trouve au milieu d'un jardin d'où partent quatre fleuves, vers les quatre points cardinaux. Il porte textuellement le nom d' « Arbre qui est au milieu du jardin » et la tradition chrétienne, renouvelant la tradition rabbinique, l'appelle « Arbre de la Science du Bien et du Mal ». En fait, ce symbole traduit la connaissance, le fruit de l'arbre étant la manifestation de cette connaissance dans l'homme. Il est l'objet d'un interdit pour les raisons qui sont exposées dans la première partie de ce livre.
L'intervention de la femme doit s'interpréter comme la conjugaison nécessaire du principe masculin et du principe féminin dans la connaissance, le premier apportant au second la substance vivante alors que ce dernier n'est capable d'assumer que les structures. Quant au serpent, il a des significations sur plusieurs plans ; la plus intéressante est probablement celle qui s'apparente à la notion de Kundalini des Yogis hindous — la Kundalini étant traditionnellement représentée comme identique à la force sexuelle, semblable à un serpent par sa forme, et provoquant par son ascension l'accès à la connaissance. Le serpent est, bien entendu, à la fois sacré et maudit (voir au mot Serpent).
On trouve aussi dans la mythologie gréco-latine une expression de la tentation par le serpent (voir au mot Ane). Quant à l'arbre de vie, on en retrouve la réplique dans tous les folklores et toutes les mythologies, et aussi cette notion que le fruit de cet arbre est une pomme. Les pommes d'or du jardin des Hespérides en sont un exemple connu ; la pomme du paradis terrestre passe pour être un fruit ordinaire. Pour que le symbolisme soit homogène, il faut aussi que ce fruit porte un signe : or, ce signe apparaît lorsqu'on coupe une pomme selon son grand diamètre équatorial. Les pépins et l'en semble de l'appareil reproducteur sont disposés très exactement selon une étoile à cinq branches (voir le mot Cinq).
Quant à l'arbre lui-même, il n'est nullement précisé qu'il soit un pommier. Certains ont voulu voir dans l'arbre, dont les branches se divisent dichotomiquement (1) le symbole de l'analyse ou de la dialectique. Il est certain que l'analyse est à la fois un instrument utile et une occasion de chute et de destruction, comme la dialectique. Mais — et c'est là où la prédestination de l'Homme est inscrite — le passage par l'étage dialectique est une dégradation nécessaire.
Le fruit de l'arbre n'est pas un mal en soi. Le péché était seulement de l'avoir « croqué », c'est-à-dire d'avoir mutilé le tout vivant par curiosité, et de se l'être approprié ; c'est d'autant plus un péché que la mutilation le fait apparaître sous des dehors conceptuels alors que sa vraie nature est d'être intacte et intuitivement saisie dans son unité, par voie de participation. Ajoutons que mille autres interprétations ont été fournies qui se ramènent analogiquement à celle-là.
(1) de manière dichotomique, par dichotomie, en divisant par deux.